Frères de Genève : peines fermes, expulsion du Kosovar et acquittement partiel de terrorisme par le Tribunal pénal fédéral

Frères de Genève : peines fermes, expulsion du Kosovar et acquittement partiel de terrorisme par le Tribunal pénal fédéral

Verdict et peines prononcées

Deux hommes surnommés les « Frères de Genève » ont été condamnés par le Tribunal pénal fédéral dans une affaire mêlant terrorisme et délits économiques. Le premier prévenu, ressortissant kosovar, reçoit 30 mois d’emprisonnement, dont 15 mois avec sursis, et une peine pécuniaire équivalente à 120 jours-amendes à 30 francs, avec sursis également. L’expulsion du territoire suisse est prononcée pour une durée de cinq ans.

Le second prévenu, détenteur d’une double nationalité suisse et macédonienne, est condamné à 53 mois de prison ferme et à 15 jours-amendes à 30 francs avec sursis. En raison de sa double nationalité, il ne peut pas être expulsé.

Indemnisation relative à la détention pré-jugement

La détention préjugement, totalisant 1181 jours, est déduite des condamnations. Le kosovar ayant passé 149 jours de trop derrière les barreaux, la Confédération lui versera une indemnité de 13’410 francs au titre de réparation du tort moral. Ces condamnations ne sont pas définitives et peuvent être contestées devant la Cour d’appel du Tribunal pénal fédéral.

Faits retenus et portée des infractions

Selon le jugement, les faits reprochés relevaient du soutien à une organisation terroriste, en l’occurrence l’État islamique. Le prévenu à double nationalité est également reconnu coupable de soutien au groupe Jabhat al-Nusra.

Autres infractions et procédures

Les deux hommes sont également condamnés pour tentative de corruption d’un magistrat kosovar et pour entrave à l’action pénale des autorités de ce pays, ainsi que pour plusieurs infractions patrimoniales, notamment des escroqueries, du blanchiment et des faux dans les titres.

En revanche, les juges de Bellinzone n’ont pas retenu l’accusation de participation à une organisation terroriste. Le Ministère public de la Confédération (MPC) reprochait aux accusés d’être les chefs, respectivement membres, des « Frères de Genève », antenne suisse de l’organisation kosovar des « Frères de Viti ». Les « Frères de Viti » auraient eu pour objectif de déstabiliser une région à l’est du pays pour y installer un califat et imposer la charia. Si les accusés ont effectivement apporté un soutien financier, il n’est pas établi que leur but principal était de commettre des actes violents ou terroristes, ni qu’ils aient été impliqués dans de tels actes.

Réactions des avocats et suites possibles

Selon Me Kastriot Lubishtani, l’avocat du ressortissant kosovar, le Tribunal pénal fédéral a écarté l’essentiel des accusations de terrorisme et a refusé de criminaliser des convictions. Il parle d’une victoire pour l’État de droit et souligne l’indemnisation comme élément de réparation pour la détention excessive.

Son collègue, Me Julian Gafner, a ajouté que l’acquittement partiel concernant la participation à une organisation terroriste représente une avancée du raisonnement du tribunal. Les avocats n’excluent pas un recours sur certains éléments du verdict et sur l’éventuelle expulsion d’un des prévenus.

Le parquet fédéral a réagi en indiquant qu’il prend acte du jugement et attend le texte motivé pour décider des suites à donner. Le parquet et la défense disposent d’un délai de 10 jours pour faire appel.

Enjeux et perspectives

Ce dossier illustre les complexités liées à l’incrimination et à l’évaluation des faits dans une affaire de terrorisme, ainsi que les mécanismes d’indemnisation lorsque la détention préventive est jugée excessive. Le jugement motivé sera publié ultérieurement et une voie d’appel demeure possible.