Débat sur la suppression de la valeur locative : Quel impact pour les propriétaires en Suisse ?

Contexte et enjeux de la réforme fiscale sur la valeur locative
René et Fabienne Sonney, retraités et propriétaires d’une maison à Ependes dans le canton de Fribourg depuis 45 ans, partagent leur expérience vis-à-vis de la valeur locative, un élément clé de la fiscalité immobilière suisse.
« Je suis imposé sur une valeur locative annuelle de 17’000 francs, avec la possibilité de déduire les intérêts hypothécaires », explique René Sonney dans l’émission La Matinale de la RTS. Avec des intérêts limités à environ 600 francs par an et une déduction forfaitaire pour frais d’entretien s’élevant à 3’395 francs, il précise que la valeur locative alourdit son impôt d’environ 3’204 francs annuellement.
Si le vote du 28 septembre aboutit à la suppression de la valeur locative, ce couple fribourgeois serait selon certaines estimations parmi les bénéficiaires potentiels, notamment parmi les retraités ayant presque remboursé leur hypothèque, ou encore les propriétaires aisés qui ont acquis leur bien sans recours à un emprunt important.
Conséquences pour les nouveaux propriétaires et familles endettées
À l’opposé, Dominique et Calixe Cathomen-Moinat, qui résident à Bussigny dans une maison acquise il y a sept ans, soulignent une perspective différente. Comme ils sont encore fortement endettés, la suppression de la valeur locative les priverait de la faculté de déduire les intérêts liés à leur prêt immobilier.
« Nous avons contracté une hypothèque importante, donc cette réforme ne représenterait pas un avantage pour nous », précise la famille nombreuse. De plus, au mieux mise en œuvre en 2028, la réforme pourrait limiter ou retarder l’accès aux dispositifs d’allègement fiscaux destinés aux primo-accédants dans les dix années précédant la réforme, selon leurs observations.
Impact sur les déductions liées aux frais d’entretien
La suppression envisagée de la valeur locative impliquerait également la disparition de certaines déductions fiscales, notamment celles pour les frais d’entretien des logements. Pour René Sonney, cette élimination aurait un effet limité, sa maison étant déjà équipée de panneaux solaires depuis plusieurs années, et les rénovations majeures telles que la rénovation du balcon datent de 5 à 6 ans, toutes déduites fiscalement à l’époque.
Enjeux d’investissement et entretien des biens immobiliers
Ingénieur de formation, René Sonney considère que la valeur locative représente une anomalie fiscale. Il ne perçoit pas l’abandon de ce système comme un élément influant sa gestion ou l’entretien de sa propriété. « La décision d’investir ou de différer les travaux dépend avant tout de la responsabilité de chaque propriétaire », affirme-t-il.
En revanche, Calixe Cathomen, architecte et élu municipal socialiste, se montre plus réservé. Après avoir réalisé d’importants travaux sur leur villa, notamment l’isolation du toit pour améliorer la performance énergétique, il craint que sans déductions fiscales, de nombreux propriétaires renoncent à de tels investissements. « Une rénovation aux normes actuelles pour une maison comme la nôtre peut coûter plusieurs centaines de milliers de francs, mais cela représente un gain de confort important », souligne-t-il.
Rôle potentiel de la fiscalité dans la transition énergétique
Selon cet expert, la suppression des déductions pourrait freiner les initiatives privées en faveur de la transition énergétique. Pour lui, l’absence d’incitations fiscales risquerait de décourager les propriétaires, notamment dans un contexte où l’immobilier reste cher et les coûts de rénovation élevés.
Il insiste ainsi sur la nécessité d’une contribution collective aux enjeux environnementaux et avertit que demander un effort individuel sans garde-fous pourrait poser des difficultés à certains ménages. « Il est compliqué d’espérer que chacun puisse financer seul les travaux, surtout lorsque le prix du logement est élevé », conclut Calixe Cathomen.