Biodiversité en Suisse : pourquoi le pays demeure en retard par rapport à l’Europe
Un état des lieux contrasté de la biodiversité en Suisse
L’image bucolique de forêts profondes et de vallées préservées masque une réalité plus complexe: selon BirdLife et l’Agence européenne pour l’environnement, seulement 10 % du territoire helvétique est réellement protégé, bien loin des 26 % observés en moyenne dans l’Union européenne.
Des objectifs non atteints malgré les engagements
Malgré l’adhésion à la Convention sur la diversité biologique et l’application d’une Stratégie Biodiversité 2030, la Confédération n’a rempli qu’un seul des 18 objectifs fixés, celui relatif à la préservation des forêts. Les avancées concernant les corridors écologiques, la protection des espèces prioritaires ou l’extension des réserves naturelles restent modestes.
Une érosion de la biodiversité préoccupante
Le rapport publié par BirdLife le 28 octobre 2025 montre qu’un tiers des espèces animales et végétales suisses est menacé, tout comme la moitié des milieux naturels. Les causes évoquées incluent l’agriculture intensive, des infrastructures morcelant les habitats, la disparition des zones humides et l’urbanisation rapide. Certaines espèces, comme des oiseaux nicheurs, des abeilles sauvages et le lynx, sont classées en danger par la Confédération.
Un débat politique et des mesures en gestation
Le débat est devenu fortement politique: le rejet du contre-projet indirect à l’initiative pour la biodiversité, jugé trop contraignant pour l’économie, l’agriculture et le développement des infrastructures énergétiques, a constitué un tournant. La Confédération consacre environ 600 millions de francs par an à la biodiversité et a lancé un nouveau plan d’action en 2024; toutefois, l’Office fédéral de l’environnement avertit que les effets se manifesteront sur le long terme.
Réalités et controverses autour des surfaces protégées et de leur avenir
Certaines voix relativisent ce classement européen. Pour Michel Darbellay, membre de l’Union suisse des paysans, les critères européens n’intègrent pas les surfaces agricoles dédiées à la biodiversité: il soutient que plus des deux tiers du territoire se trouvent près d’un état naturel, et que réserver davantage de terres arables à la biodiversité pourrait réduire l’approvisionnement local et accroître les importations.
Une perte de biodiversité à l’échelle mondiale et ses répercussions
À l’échelle mondiale, la diminution des populations d’animaux sauvages est bien réelle: entre 1970 et 2020, elles auraient chuté d’environ 73 %, selon le WWF dans son rapport publié en 2024. Cette diminution affecte directement nos systèmes agricoles et nos écosystèmes, qui deviennent plus vulnérables face aux phénomènes climatiques extrêmes et à la propagation de maladies. Pour de nombreux scientifiques, il s’agit d’un signe de la sixième extinction de masse, liée au changement climatique, à l’exploitation des ressources et à l’urbanisation. Au niveau mondial, plus de trois milliards de personnes dépendent de la biodiversité marine et côtière pour leur subsistance.